Trois nuits avec Madox

TROIS NUITS AVEC MADOX

Editions Lansman, 1995

Pièce écrite en 1994

5 rôles (4 hommes, 1 femme)

 

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Un bar au bout de la terre, quelque part vers le nord, dans un village dépeuplé où règne l'ennui. Parmi les derniers habitants, Bruno, le patron du bar et Grubi, le gardien du phare, se connaissent depuis toujours. Ils sont nés là et y sont restés. Et puis, il y a les autres. César, le chauffeur de taxi qui vient de Paris, Clara, l'ancienne prostituée du port qui s'est retranchée avec "les filles" dans une maison de retraite, Ndjiami, le balayeur qui se retrouve là comme il aurait pu être ailleurs... Tout ce petit monde se retrouve ce jour-là chez Bruno parce que le nouveau venu, Madox, n'est pas comme les autres et qu'il va bien falloir finir par oser en parler. Les langues se délient, les intérêts se dévoilent, les rêves s'effritent, la petite communauté s'insurge...
Que faire quand il n'y a plus rien à faire contre les limites de la pensée, contre les limites de l'être, contre cette cage qu'est la société, contre cette cage qu'est la solitude, contre la peur de l'exclusion, contre le spectre de la folie, contre...

Personnages :

Bruno, patron de bar
Grubi, gardien de phare
César, chauffeur de taxi
Clara, ancienne « fille » dans une maison close
Njami, baleyeur


GRUBI (après un moment) – Ecoute, Bruno…
BRUNO – Quoi ?
GRUBI – Tu sais à quoi je pense ?
BRUNO – Oui.
GRUBI – Peut-être qu’il ne s’agit pas du même type.
BRUNO – Peut-être.

Long silence rythmé par le glouglou de l’eau dans la cafetière.

GRUBI – Y a combien d’années qu’on se connaît ?
BRUNO – Ehé… Il y a belle lurette…
GRUBI – Tu vois?
BRUNO – Quoi ?
GRUBI – Je ne blague pas, moi  !
BRUNO – Moi non plus.
GRUBI – Et je te jure qu’on a joué toute la nuit aux dés.
BRUNO – Peut-être que tu as fait un rêve.
GRUBI – Non, j’ai joué avec ce type.
BRUNO – Au moins… tu as gagné?
GRUBI – Non… mais j’ai bien aimé sa façon de jouer. Il ne joue pas pour gagner.
BRUNO – C’est lui qui t’a dit ça ?
GRUBI – Oui.

Sifflement de la cafetière.

BRUNO – A moi aussi, il me l’a dit.
GRUBI – Quoi exactement?
BRUNO – Qu’il ne joue pas pour gagner, qu’il joue tout simplement parce qu’il aime jouer.
GRUBI – Alors il nous a dit à peu près la même chose. Et il m’a dit aussi qu’il gagne toujours, et à tous les jeux… Il t’a débité la même salade ?
BRUNO – A peu de choses près, oui.
GRUBI – Sale histoire !

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Matéi Visniec, c’est tout d’abord un univers, une perception, un moment magique qui nous emporte vers les turbulences de nos sentiments. Ses personnages sont à notre image et c’est sans doute pour cela qu’ils nous amusent, qu’ils nous émeuvent ou qu’ils nous apitoient… Avec une écriture claire, directe, des phrases « coup de poings », des mots flèches qui font percuter les idées et donnent force au jeu théâtral, Matéi Visniec nous offre un théâtre vivant, dérangeant, drôle et toujours surprenant. 
(La compagne du Guichet Montparnasse, Annie Vergne – Alain Vérane, 1995)
Matéi Visniec cultive un sens réjouissant et très personnel de l’absurde. Pour qui aime l’étrangeté et le refus de la logique, c’est délectable et bien joué.

(Gilles Costaz, Le Nouveau Politis, 1995)


La petite communauté est agitée par la venue dans le village d’un étranger, un certain Madox, avec lequel chacun d’eux prétend avoir passé les trois dernières nuits à écouter la même histoire et à jouer avec lui, chacun à un jeux différent. Qui ment ? Qui a vraiment vu Madox ? Qui est-il ? Et s’il n’était pas qu’un fantôme, une bouée de sauvetage de ces petits gens qui, à force de tromper leur ennui, leur solitude, de refouler leur échecs, s’inventent un mirage, une échappatoire à leurs existences vides ? Chacun s’étant approprié la même fiction qui les sauve d l’ennui, tous se sentent trahis, puisqu’il est impossible de partager Madox il ne reste plus qu’à s’allier pour s’en débarrasser. La présence du mystérieux Madox n’ouvre-t-elle pas une sorte de boîte de Pandore d’où s’échappent les angoisses, les cauchemars, les désirs, les haines et les lâchetés refoulées de ce petit monde ?

(Irène Sadowska-Guillon, L’avant-Scène 965, 1995)

Théâtre du Guichet-Montparnasse, Paris, 1995, mise en scène Alain Vérane

Création radio, Claude Roland-Manuel, France Culture, 1994

roumain (disponible en manuscrit, traduction par l'auteur)

anglais (disponible en manuscrit, traduction Mark Bromilow)

italien (disponible en manuscrit, traduction Ivano Bruno)

hongrois (disponible en manuscrit, traduction Szlafkay Attila)

hongrois (disponible en format électronique, traduction Eva Patkó)

persan (disponible en manuscrit, traduction Tinouche Namjou)

bulgare (disponible en format électronique, traduction Ognan Stamboliev)

MENTIONS LEGALES

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