La femme comme champ de bataille

LA FEMME COMME CHAMP DE BATAILLE

ou Du sexe de la femme comme champ de bataille dans la guerre en Bosnie

Actes Sud-Papiers, 1997

Pièce écrite en 1996

2 rôles (2 femmes)

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La pièce nous met en présence de deux femmes plongées dans la réalité de la tragédie bosniaque. L'une, la Bosniaque, a été violée. L'autre, l'Américaine, en tant que psychologue, est venue soutenir les équipent qui ouvrent des charniers, mais craque nerveusement devant l'horreur. Dorra et Kate, deux mondes qui se rencontrent, l'Est et l'Ouest, deux femmes bouleversées à vie par l'histoire, toutes les deux victimes, toutes les deux marquées à vie. L'une dans l'intimité de sa chaire, l'autre dans l'intimité de sa conscience. Qui a le plus besoin de l'autre ? De cette rencontre naîtra un dialogue, une amitié profonde, une complicité pour trouver la sortie du cauchemar.


DORRA et KATE mangent ensemble. Des fleurs sur la table, une bouteille de rosé. Atmosphère détendue, elles finiront par se griser un peu et entrer dans une vraie complicité.

DORRA (en mangeant) - Dès qu’il boit un verre, dans l’homme des Balkans s’éveille le sens de l’histoire. Dans le bistrot minable où il se soûle la gueule, qu’il soit à Zagreb, à Belgrade, à Tirana, à Athènes, à Bucarest, à Sophia, à Ljubliana ou à Skopjie, l’homme balkanique devient tout de suite internationaliste et généreux dans l’amour pour son proche. C’est alors qu’il juge tout le monde à travers la philosophie du "mais". Mais, c’est le mot clef de la spiritualité balkanique, c’est le miroir de la pensée, c’est la marche où le discours plat bascule dans la dialectique nuancée.

Musique tsigane. Ou c'est peut-être DORRA qui chante un bout de chanson tsigane.
Dans les monologues suivants, ce n'est pas DORRA qui parle, mais sa mémoire et son expérience de la vie. Elle entre chaque fois dans la peau de ces "hommes des Balkans" qui débitent depuis des lustres les mêmes clichés, les mêmes lieux communs et les mêmes méchancetés à l'adresse de leurs autres "frères des Balkans" d'une autre nationalité.

DORRA (dans la peau d'un "homme des Balkans") - Les Tsiganes, je les aime bien, je n’ai rien contre eux, allez, Tsigane, chante-moi quelque chose, non, les Tsiganes c’est sympa, ça vient de loin, ils ont à la fois quelque chose de mystérieux et de gai... Mais ils sont quand même tous des voleurs, il faut se méfier, ils volent des chevaux, des moutons, des poules, des enfants, vraiment, trop c’est trop, et en plus ils nous volent maintenant notre folklore sacré, nos plus belles chansons qu’ils sortent sur des CD en Occident et ils gagnent des millions de dollars...

Le même jeu. Musique albanaise.

DORRA (dans la peau d'un autre "homme des Balkans) - Les Albanais, les pauvres, je les aime bien, j’ai eu un collègue albanais de Kossovo à la fac, il était silencieux, discret, économe, il est sorti chef de promotion, c’est sympa les Albanais, surtout ceux du nord qui sont des catholiques, non, les Albanais, je n'ai rien contre eux, ils sont peut-être le peuple le plus vieux dans les Balkans... Mais dans l’Europe d'aujourd'hui il faut reconnaître qu’ils sont quand même les derniers de la classe, Enver Hodja les a vraiment foutus dans un sacré pétrin, heureusement qu’on les a envoyé de la bouffe, ils ont été les clients de tout le monde, les clients des Yougoslaves, des Soviétiques, des Chinois, pour se fâcher ensuite avec tout le monde, et maintenant ils sont tous des irrédentistes, ils ne pensent qu'à se rattacher le Kosovo comme si ça pouvait les tirer d’affaire...

Elles trinquent.
DORRA - Santé!
KATE - Cheers!

Musique bulgare. DORRA, de plus en plus déchaînée, claque les doigts, chante.

DORRA (dans la peau d'un autre "homme des Balkans" qui parle de ses "frères des Balkans") - Les Bulgares, oh, les Bulgares c’est bien, c’est des très bons jardiniers, ma mère n’achetait ses légumes que chez son marchand bulgare, t’as vu les cornichons qu’ils ont et le yaourt, c’est pas rien ça, le yaourt bulgare c’est imbattable, le goût bulgare, et les roses, ça c’est vraiment formidable, leur confiture de pétales de roses, t’as jamais goûté ça, c’est vraiment bon, moi, j’aime bien les Bulgares... Mais il faut pas oublier que c’est des frustrés quand même, ce sont eux qui ont déclenché la guerre balkanique de 1913, ils voulaient avoir un pays plus grand que leurs besoins, ces Bulgares, ils voulaient avoir toute la Macédoine pour faire pousser là leurs cornichons, et même aujourd’hui, ils disent que les Macédoniens sont des Bulgares, ils ont bulgarisé les noms de tous les Turcs qui habitaient chez eux, c’est ça les Bulgares, avec eux ça marche seulement si tu les remets à leur place... Santé!
KATE - Cheers!

Elles trinquent et s'embrassent. DORRA reprend le jeu. Musique turque. KATE remplit les verres et participe de plus en plus au jeu.

KATE - Ca c'est turc!
DORRA - Oui, c'est turc.
KATE - Donc, les Turcs...
DORRA (dans la peau d'un autre "homme des Balkans") - Les Turcs, moi, je les respecte les Turcs, les Turcs, ça reste une force, un pied en Asie, un pied en Europe, les Turcs, ça reste incontournable, je suis allé cet été à Istanbul, c’est fou ce que tu trouves là, ça reste un grand empire, les Turcs, d’ailleurs c’est avec eux que nous faisons maintenant des affaires car les Français, les Italiens, les Anglais, ils sont loin, ça leur prend trop de temps pour venir jusque chez nous. Non, les Turcs, ils sont très travailleurs, t’as vu combien il y en a en Allemagne, et ils travaillent tous, il y a quatre millions de chômeurs en Allemagne mais les Turcs qui sont là ils ont tous trouvé du travail, vraiment, il y a quelques mois, un Turc a ouvert une boulangerie à côté de chez moi, maintenant je mange du pain turc et c’est bon, les Turcs, ils reviendront peu à peu dans les Balkans, tu verras, moi, je n’ai pas d'amis turcs et pourtant je les respecte les Turcs... Mais je n’aime pas qu’ils prennent la place de nos boulangers, c’est fou, on dirait que nous, on n’est plus capable de faire du pain, et là ils arrivent maintenant pour nous montrer comment il faut faire le pain, moi j’aime pas ça, qu’ils reviennent là avec leurs fours électriques qu’ils ont achetés à l’Ouest avec notre argent car c’est quand même les Turcs qui nous ont spolié pendant quatre siècles, même cinq... Et à part ça ils ne sont même pas des Européens, les Turcs, mais on les a déjà reçu dans Alliance Atlantique et tu verras qu’ils vont entrer avant nous dans l’Union Européenne.

Elles trinquent et boivent. Musique juive.

KATE - Ca c'est...
DORRA - Les Juifs...
KATE - Ah! Donc... j’aime bien les Juifs...
DORRA - J’ai des amis juifs, j’ai eu des voisins juifs...
KATE - Quand j’étais gosse je jouais avec les enfants des Juifs du quartier...
DORRA (le même jeu) - C'est ça... Moi, je trouve que c’est dommage que les Juifs soient partis peu à peu de chez nous. Dans ma ville natale, entre les deux guerres, il y avait cinq mille Juifs, cinq mille Allemands et nous, on était seulement quatre mille. Tu te rends compte? Moi, je pense que c’était pourtant bien, les Juifs ils étaient tous des commerçants, des intellectuels. Mon prof d’histoire, au lycée, était juif, le dentiste où m'emmenait ma mère était juif, quand j’ai commencé à prendre des leçons de violon, la dame chez qui on allait était juive. Et ensuite ils sont presque tous partis en Palestine. Non, les Juifs sont des gens très bien, et en plus, où ils s’installent l’économie fleurit...
KATE - Mais...
DORRA - Voilà, t'apprends vite... Mais il faut quand même pas oublier qu’ils ont crucifié notre Seigneur Jésus Christ. Et de toute façon, dès qu’ils ont vu que le communisme ne marchait plus à l’Est et qu’on y vivait de plus en plus mal, ils sont partis en masse, malgré le fait qu’ils avaient la nationalité... Cheers!
KATE - Santé!

Le même jeu. Musique serbe.

KATE - Alors, la suite...
DORRA - Les Serbes...
KATE - Les Serbes, j’aime bien les Serbes...
DORRA - Ma femme est d’ailleurs serbe, parmi les Slaves des Balkans les Serbes sont les plus farouches, ils ont cette âme de la première heure, ce côté sauvage qui fait trembler l’histoire, les Serbes, ça a un charme fou car ils sont malheureux par leur nature, c’est pour ça d’ailleurs qu’ils sont aussi de sacrés fêtards, et de sacrés révoltés, car c'est un malheur ancestral qu'ils portent dans leurs tripes, oui, les Serbes, ils ont le sang chaud, ça leur brûle la peau, les Serbes, ils doivent être toujours en mouvement, toujours agités, je te jure, ma femme est serbe, les Serbes, ils sont beaux dans leur délire sans fin...
KATE - Mais...
DORRA - Mais parfois ils exagèrent quand même, à vrai dire, ils exagèrent tout le temps, ils n’ont pas de limites, les Serbes, c’est des nationalistes pur sang, c’est des vrais fous, ils ne pensent qu’à leur empire perdu de XIV-ème siècle, à leur Etienne Douchan, d’ailleurs depuis ils n’ont plus fait grand chose, des éleveurs de porcs, quoi, qui rêvent maintenant d'une Grande Serbie, moi, les Serbes, j’en ai ras la casquette, d’ailleurs mon ex-femme qui était serbe m’a quitté pour un putain de Serbe, pour un putain de bon à rien de sa race.

Les filles s'embrassent, mangent, boivent. Le jeu continue. Musique croate.

KATE (la bouche pleine) - Ca c'est...
DORRA (la bouche pleine) - Les Croates...
KATE - Les Croates, j’aime bien les Croates...
DORRA - C’est beau chez eux, c’est propre, c’est impressionnant, t’as vu la cathédrale qu’ils ont à Zagreb, les Croates, ça se voit qu’ils sont des catholiques, ça se voit qu’ils ont côtoyé la civilisation latine, la latinité, le Pape, l’esprit de Venise, les Croates, ça a l’âme fine, affinée, ils sont comme la Mer Adriatique, ils ont de l’ouverture, ils voient loin, c’est des Slaves occidentalisés, quoi, ils ont bien fait de foutre en l’air les caractères cyrilliques et d’écrire avec des caractères latins, ça leur a fait faire un bond de cent ans en avant, non, les Croates, je les connais bien ils sont nos frères jumeaux...
KATE (en mangeant, la bouche pleine) - Mais...
DORRA - ...mais tu sais, personne ne te frappe plus méchamment que ton frère, c’est comme ça les Croates, ils te frappent dans le dos, ils trahissent tout le temps, t’as vu ce qu’ils ont fait en 41, ils sont tous passés du côté des nazis, tous, enfin, tous sauf Tito, c’est ça les Croates, tous des oustachis, et même maintenant, ils s’acoquinent toujours avec les Allemands, c’est là leur vraie patrie, oh les Croates... A la nôtre!
KATE - A la nôtre!

Musique grecque. DORRA danse assise.

KATE - Ah, ça je connais, c'est grec.
DORRA (en dansant) - Les Grecs...
KATE - Les Grecs, ah, j’adore les Grecs...
DORRA - Avec les Grecs on peut vraiment s'éclater...
KATE - Tu vois comme ils jouent le sirtaki?
DORRA - Ils sont fous, les Grecs, ils sont beaux, les Grecs, le Grec, dès qu'il devient ton ami, il te donne tout, ils ont laissé pas mal de traces dans l'histoire, les Grecs, ils ont quand même posé les bases de la civilisation...
KATE - Mais...
DORRA (elle arrête la danse) - Mais tu sais, les Grecs d'aujourd'hui n'ont rien à voir avec les anciens, les Grecs d'aujourd'hui, ils se croient les descendants directs de Périclès, ha, ça me fait rire, t'as vu la tenue de leur garde nationale...
KATE - C'est du folklore!
DORRA - Ah, les Grecs, ces phanariotes, cette nation de marchands sans scrupules, ils se construisent maintenant des autoroutes avec l'argent de l'Union Européenne...
KATE (en ouvrant une bouteille de champagne) - Ah non!
DORRA - Ah oui!

Le bruit sec du bouchon qui saute. Les filles boivent du champagne. Le jeu continue. Musique hongroise. L'alcool monte peu à peu à la tête.

KATE - Les...
DORRA - Les Hongrois...
KATE - Ah oui! J’aime bien les Hongrois...
DORRA - Ils sont très originaux, les Hongrois, t’as vu la langue qu’il parlent?
KATE - Ca ne ressemble à rien...
DORRA - Tu ne comprends pas un mot, c’est pas du latin...
KATE - C’est pas du slave...
DORRA - C’est pas du grec...
KATE - C’est pas du turc!
DORRA - C’est pas de l'allemand
KATE - C’est du hongrois!
DORRA - C’est ça les Hongrois, ils ne rassemblent à personne, c’est des insoumis, c’est des dominateurs, t’as vu comme ils ont osé se révolter en 56 contre Moscou? C’est fou, ils voulaient foutre en l’air le communisme dès 56, ils ont eu un sacré culot ces Hongrois, et ils l'ont payé cher, et pourtant t’as vu après, ils ont vécu quand même mieux que nous, même sous Kadar, plus de liberté, plus de petits commerces, preuve que le grand frère soviétique avait plus de respect pour le petit frère hongrois que pour les autres petits frères, c’est ça les Hongrois, virils historiquement...
KATE - Mais...
DORRA - ...mais des profiteurs aussi, des mégalos aussi, les valets des Autrichiens, qu’est-ce qu’ils croyaient ces Hongrois, que leur Empire bicéphale, que leur Empire Autriche-Hongrie allait durer mille ans? C’est leur arrogance impériale qui les a perdus, c’est la démesure, c’est...

Le même jeu. Musique roumaine.

KATE - Ah, non! Ca finit pas.
DORRA - Tu sais, nous sommes nombreux dans les Balkans... Les Roumains...
KATE (elle joue la lassitude) - J’aime bien les Roumains...
DORRA - C'est le seul peuple latin dans la région, t'as vu quand ils parlent, on dirait du français, et entre les deux guerres, Bucarest, tu sais comment on l'appelait, on l'appelait "le petit Paris", j'aime bien les Roumains, et en plus ils sont nombreux, et les Roumaines, c'est fou quel succès ont maintenant les putes Roumaines en Turquie, même les nôtres, maintenant, ont commencé à apprendre le roumain pour passer pour des Roumaines à Istanbul, j'aime bien les Roumains...
KATE - Mais...
DORRA - ...mais ils sont un peu trop fatalistes, quand même, et de vraies girouettes, toujours du côté des vainqueurs, et même leur langue, c'est truffé de mots slaves, et en plus ils disent qu'ils ne sont pas des balkaniques, que les Balkans s'arrêtent au Danube, mais rien de plus balkanique que les Roumains, je t'assure...
KATE (elle coupe DORRA pour accélérer le jeu) - Les Musulmans...
DORRA - Les Musulmans de Bosnie? Ils ont beaucoup souffert, ces gens-là. Ils méritaient bien un pays. T'as vu comme ils ont résisté à Sarajevo?
KATE - Chapeau!
DORRA - Ils ont des tripes, les Musulmans. Moi, je les aime bien, les Musulmans de Bosnie...
KATE - Mais...
DORRA - ...mais il faut pas oublier pourtant qu'ils sont, à l'origine, des Slaves islamisés.
KATE - Des traîtres quoi!
DORRA - En fait, on ne sait même pas comment les appeler. Au siècle dernier on les appelait "Turcs". Et ensuite il y a eu Tito, qui a eu cette idée, d'inventer une nationalité musulmane, qui n'existe nulle part au monde. D'ailleurs, à l'époque l'Arabie Saoudite a protesté...
KATE (grisée, victorieuse) - Les noirs...
DORRA - Qui?!
KATE - Les noirs...
DORRA - Il n’y a pas de noirs dans les Balkans.
KATE - Oui, mais...
DORRA - Mais...
KATE - Mais le mais... il est partout... Tu crois que le mais balkanique c'est seulement made dans les Balkans? Non, là tu te trompes, ma poule... Il faut que tu viennes un jour chez moi pour entendre la musique du mais balkanique à l'américaine... Les noirs, c’est sympa les noirs, j'aime bien les noirs, c'est fou comme la musique coule dans leurs veines, les noirs, ils ont inventé le blues, les noirs, ils ont inventé le gospel song, ils sont de merveilleux boxeurs, les noirs...
DORRA - J’aime bien les noirs...
KATE - Mais...
DORRA - Mais...
KATE - Mais...
DORRA - Mais...
KATE - Mais le problème c'est... qu'il y a "a black problem".
DORRA - Une question "noire"...
KATE - Car ils ne sont pas comme nous...
DORRA (elle joue la fille qui comprend vite) - Parce qu'ils sont noirs!
KATE - Non... Il faut être politiquement correct... Parce qu'ils sont des gens de couleur... et ça manque de culture... et ça sent mauvais... et ils sont violents... et ils sont des émeutiers... et des fauteurs de troubles... et des dealers... Voilà... Et il n'y a pas seulement the fucking bloody niggers qui nous emmerdent... Non... Il y a aussi...
DORRA (de plus en plus grisée) - Les Indiiiens...
KATE - C'est çaaa... Les Indiiiens...
DORRA - Qui sont beaux...
KATE - ...avec leurs plumes, c’est décoratif...
DORRA - Mais...
KATE - Mais...
DORRA - Mais...
KATE - Mais c’est mieux lorsqu’ils sont mooorts, un bon Indien c’est un Indien mooort, a good Indien it’s a dead one...
DORRA - Shiiit...
KATE - Ouais... Yeah... Et il y a aussi les Mexiiicains...
DORRA - Mais pas dans les Balkaaans...
KATE - Mais...
DORRA et KATE - ...il y a des Balkans qui sont partout...
DORRA - Alors, les Mexicaines, j’aime bien les Mexicains...
KATE - Ils sont sympas les Mexicains...
DORRA - Ils ont de grands chapeaux...
KATE - Des sombreros...
DORRA - Et des ponchos...
KATE - Et des guitares...
DORRA - Mais...
KATE - Mais...
DORRA - Mais...
KATE - Mais ils veulent tous venir chez nous, the bloody fucking Mexicans, chez nous aux Etats-Unis, ces putains de Mexicains, tous les jours, tous les jours il y a des milliers de bloody fucking Mexicans qui franchissent la frontière pour travailler au noir chez nous... Oh, Goodness!
DORRA - Et il y a aussi les Portoricains...
KATE - Ah, oui, les Portoricains...
DORRA - J’aime bien les Portoricains...
KATE - Mais...
DORRA - Mais...
KATE (elle joue le raciste déchaîné, frappe du poing sur la table) - Les Portoricains, j’en ai assez, ça me fait chier!
DORRA - Et il y a aussi les...
KATE - Les...
DORRA - Les... Aztèques...
KATE - Ah, j’aime bien les Aztèques...
DORRA - C’est sympa, les Aztèques...
KATE - Oui, mais...
DORRA - Mais...
KATE - Mais...
DORRA - Mais ils sont des Aztèques! Voilà!
KATE - Ah oui! Ah oui, putain, j'oubliais... Ils sont des Aztèques...
DORRA - Comme d'ailleurs les...
KATE - Les... Patagonais...
DORRA - Les Patagonais, oui...
KATE - Les Patagonais... c’est sympa les Patagonais...
DORRA - Mais...
KATE - Mais...
DORRA et KATE - Ils sont des Patagonais! Merde!

Musique rock. Elles dansent (éventuellement un "rock'n'roll").

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"La Femme comme champ de bataille" est inspirée de la guerre et du drame bosniaque. Deux femmes, Kate, une Américaine, psychologue auprès des équipes de fouilleurs de charniers, et Dorra, une jeune femme violée, vont essayer d'expulser la mort, parfois avec violence. Un texte dérangeant. Pour Visniec "dans les guerres interethniques, le sexe de la femme devient un champ de bataille". Une pièce comme un cri, un fil de funambule tendu entre la vie et la mort, comme dans cette scène où Dorra, enceinte, "parle" à son ventre, à son enfant et en même temps à son violeur. Visniec nous accroche avec son univers fort, de pudeur et de violence mêlées.

(La matricules des anges, janvier/mars 1998, par L.C.)

Créations en France :

Studio des Champs Elysées, 1997, mise en scène Michel Fagadau

Théâtre de l'Est Parisien, 2000, mise en scène Guy Rétoré

D'autres créations :

Théâtre Dramatique de Skopje, Macédoine 2010, mise en scène Dejean Projkovski

Roumanie, Moldavie, Bulgarie, Belgique, Grande Bretagne, Suède, Finlande, Italie, Allemagne, Macédoine, Turquie, Canada, Iran, Japon…

anglais (disponible en format électronique, traduction Joyce Nettles)

anglais (disponible en manuscrit, traduction Alison Sinclair)

anglais américain (disponible en manuscrit, traduction Burke Walker)

suédois (disponible en format électronique, traduction Dan Shafran et Åke Nylinder)

catalan (disponible en format électronique, traduction Marta Prunés Bosh)

portugais (disponible en format électronique, traduction Alves Costa)

italien (disponible en format électronique, traduction Ivano Bruno)

bulgare (disponible en format électronique, traduction Svetlana Pancheva)

roumain (disponible en format électronique, traduction par l'auteur)

grec (disponible en manuscrit, traduction Petros Minopetros)

russe (disponible en manuscrit, traduction Marina Staryhk)

espagnol (disponible en format électronique, traduction Mylène Ghariani)

allemand (disponible en manuscrit, traduction Sybille Neuhaus)

polonais (disponible en manuscrit, traduction Dominik Paszkiewicz)

persan (disponible en manuscrit, traduction Tinouche Namjou)

japonais (disponible en format électronique, traduction Hiroko Kawaguchi)

turc (disponible en format électronique, traduction Zeynep Avcı)

MENTIONS LEGALES

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